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Droit à l’erreur : ne m’arrêtez pas si je me trompe par JM Philippon

Pour tenir leur promesse de combiner bonheur et performance au travail, les entreprises ont l’obligation de changer leurs modes de fonctionnement. Un défi tient le haut du panier des ambitions futures, Il s’agit du droit à l’erreur. Confortées par des citations inspirantes sur les biens-faits de l’échec et par l’administration fiscale qui s’y jette à grands pas, les entreprises désirent mettre le droit à l’erreur sur leur blason d’entreprise modèle. Retournement incroyable pour une majorité d’entreprises qui a fait du contrôle et de la sanction son fond de la gestion du travail. Mais alors, la carotte pourrait-elle perdre son meilleur ami le bâton ? Quelle est la véritable intention derrière cette déclaration du droit à l’erreur et comment passer de l’intention à l’action ?

Pourquoi aujourd’hui ?

Il est temps de changer

Le premier constat est de convenir que ni la carotte ni le bâton ne permettent d’enrayer la baisse continuelle du niveau d’engagement des salariés dans leur travail. Nous sommes nombreux à réfléchir à un nouveau modèle de motivation et d’engagement, dans un monde où tout change constamment. Dans ce type de modèle la sanction aura certainement un autre visage. Les évolutions de nos sociétés et les caractéristiques des nouvelles générations nous y obligent. Seul souci, on ne voit pas bien à quoi elle pourrait ressembler.

« Ce dont nous sommes sûrs c’est qu’il faut changer »

Où est l’erreur ?

Un autre constat est celui de la complexité qui vient parasiter l’ensemble du système. Par complexité j’entends la difficulté que nous avons à appréhender la totalité de tous les liens qui se créés entre tous les éléments d’un même système. La compréhension totale de tous les tenants et les aboutissants devient impossible et nous obligent à avancer sans certitude absolue. A l’heure où rien n’est certain et où l’imprévisibilité pointe le bout de son nez à chaque occasion, comment ne pas faire d’erreur ? Et, en poussant le bouchon plus loin, comment celui qui contrôle et sanctionne peut-il affirmer que lui détient la vérité ? Comment ignorer que de géniales inventions ont été issues de minables erreurs ? A l’heure où les robots prennent nos places, comment maintenir notre humanum ? Car n’oublions pas : « errare humanum est » ! Revenir à notre condition d’humain, est-ce accepter nos propres bugs ? Nous acceptons bien ceux de nos robots !

« Nous sommes encore humains, non ? »

Liberté chérie

Et le constat du besoin de liberté, parlons-en ! Entreprises libérées ou libérantes nous promettent un espace d’autonomie pour que chacun puisse exprimer tous ses talents. Mais dans cet espace de liberté jusqu’à quel point a-t-on le droit d’y faire des erreurs ? Le droit à l’erreur semble pourtant bien indissociable de la notion d’autonomie au travail. Mais ne sont-ils pas le ying et le yang d’une approche antagoniste ? L’empowerment qui donne le pouvoir de faire, donne aussi le pouvoir (ou du moins la capacité) de faire des erreurs. Il n’y a que celui qui ne fait rien qui ne se trompe pas, dit-on. Ceci explique peut-être pourquoi certains ont, depuis longtemps, peur de la délégation. Dans un système majoritairement construit sur le principe du commandement et du contrôle, nous pouvons bien le reconnaître, l’empowerment n’a jamais été totalement mis en place. Le poids de l’erreur non autorisée en est-il responsable ? Un regard nouveau sur l’erreur est sans conteste en train d’émerger.

« Nous sommes bien libres de faire des erreurs, non ? »

Tout nouveau, tout beau !

Enfin, force est de constater que l’exigence de créativité est une condition sine qua non de la survie de toute entreprise. Chaque jour nous impose une réponse nouvelle et inédite face à des situations qui ne sont plus standards. La créativité au sein des nouvelles approches comme le Lean Stratup ou le Design Thinking intègrent l’erreur comme une richesse d’apprentissage nécessaire au prototypage et à l’amélioration continue. Répondre rapidement à une nouvelle situation est une compétence reconnue sous le très beau terme « d’agilité ». L’expérience vécue il y a 10 ou 1 an, voire même un mois, ne pèse pas lourd dans l’obligation de se réinventer en permanence. Chaque jour, dans nos entreprises, nous devons réapprendre à marcher ou à faire du vélo. Et pourtant, combien de fois sommes-nous tombés avant d’apprendre ? Chaque jour nous devons construire un prototype qui devra fonctionner le jour même. Pas le temps d’hésiter, pas le temps d’essayer, pas le temps de se tromper, demain un autre défi sera là. Faire vite et bien n’est déjà pas évident, mais faire vite, bien et nouveau devient un véritable exploit. Réaliser chaque jour un exploit sans le droit de se tromper n’est pas humain !

« Les erreurs apportent bien des solutions, non ? »

Suite à ces constats, le droit à l’erreur dans nos entreprises devient une évidence incontournable. L’époque, la complexité, le besoin de liberté et l’exigence de créativité ne font plus du droit à l’erreur une option possible, mais une obligation fondamentalement humaine.

Les neurosciences nous expliquent.

Les neurosciences nous expliquent la pertinence du droit à l’erreur. L’impossibilité de se tromper paralyse totalement notre cerveau. Le stress en général génère une forme de peur qui peut déclencher la fuite ou le combat. Le stress dû à la peur de se tromper va engendrer une sorte de coupure ou d’arrêt du cerveau, lui interdisant toute forme de décision, alors qu’il est conçu pour cela. L’impossibilité de se tromper est analysée par notre cerveau comme une injonction de se saboter, comme s’il était devenu dangereux pour lui-même. C’est pour cela que le droit à l’erreur en entreprise a malgré tout franchi la porte des services recherche et développement. Car pourquoi embaucher des cerveaux si c’est pour les éteindre !

 « Intégrer le droit à l’erreur, c’est rallumer les cerveaux. »  

Nous sommes mal éduqués.

L’éducation nationale est une institution formidable. Elle a une mission qui est surement la plus belle mission pour un pays, celle d’éduquer ses enfants. Oui je dis bien « éduquer » car l’enseignement n’arrive que plus tard. Les choses sont, semble-t-il, en train de changer en France. Mais en attendant, nous avons tous connu les corrections apposées sur nos devoirs, sanctionnés par un nombre de « fautes ». Très jeunes nous avons tous été, plus ou moins, des « fautifs » en mathématiques, en français ou autres disciplines. Nous pensions avoir fait des erreurs, mais le mot « faute » faisait de notre petite personne une grosse erreur aux yeux de tous. Impossible de ne pas en faire une affaire personnelle ! Devenus adultes, nous comprenons bien qu’il s’agissait d’erreurs et non de fautes, mais la confusion est toujours présente.

« Intégrer le droit à l’erreur, c’est changer de schémas mentaux »  

Faute ou erreur ?

Il existe une méthode pourtant très claire pour séparer la faute de l’erreur en entreprise. Il s’agit de regarder à deux niveaux, celui de l’intention et celui de l’objet. Toute action volontaire et consciente réalisée contrairement aux valeurs, règles ou processus est une faute. Toute action réalisée involontairement ou par méconnaissance ne respectant pas un processus normé ou une méthodologie demandée est une erreur. Par contre, si l’objet de l’action involontaire ou de méconnaissance concerne les valeurs ou les règles, l’action devient alors une faute. Nous voyons ici l’importance et la responsabilité pour l’entreprise de bien clarifier ses valeurs, ses règles, ses processus et ses méthodologies pour permettre par la suite de ne pas faire de confusion entre fautes et erreurs. Le droit à l’erreur impose à l’entreprise qui souhaite le mettre en place un véritable travail de clarification.

« Intégrer le droit à l’erreur, c’est en profiter pour faire le ménage »

Le droit à l’erreur n’a pas le droit à l’erreur

Une entreprise qui souhaite, pour toutes les raisons exposées ci-dessus, donner le droit à l’erreur, doit respecter certains fondamentaux au niveau des valeurs, des règles et des processus.

1.      Faire vivre les valeurs au lieu de les afficher.

Ne pas respecter les valeurs est une faute, comme nous venons de le voir. Mais cette faute n’apparait que dans les comportements de celui qui les bafoue. Une valeur écrite sur un panneau dans un hall d’accueil n’a pas de valeur en soi. Ce sont les actes et les comportements de chacun au quotidien qui en leur donnant vie, leur donneront une vraie valeur. Or, très souvent, les valeurs affichées sont difficilement compréhensibles en termes d’actions et de comportements au quotidien dans l’entreprise. Comment faire vivre par exemple l’innovation, l’esprit d’équipe, la loyauté ou l’engagement ? Prenons l’innovation, il est important de savoir quel modèle adopte l’entreprise et sur quels domaines l’innovation est demandée. En un mot innover sur quoi, comment et pourquoi ? Si cette valeur n’est pas clairement déployée dans le concret des actions, il y aura de grandes chances pour qu’elle ne soit pas respectée, ce qui pourra entraîner de nombreuses fautes potentielles. De même pour la valeur d’esprit d’équipe, qui possède des contours plutôt flous, il est important de la traduire en actes concrets. Enfin pour la loyauté et l’engagement, qui sont des valeurs relativement subjectives, l’entreprise doit les convertir en comportements bien définis et factuels dans son propre écosystème.

« Les valeurs ne sont pas des fictions, ce sont des actes »

2.      Faire évoluer les règles au lieu de sanctionner.

A l’instar des valeurs, le non-respect des règles est une faute. Là encore l’entreprise possède une lourde responsabilité vis-à-vis de ses propres règles. Afin que les règles soient respectées le mieux possible, elles doivent répondre à 4 principes fondamentaux, que l’on peut appeler les 4 C. Les règles doivent être : Connues / Compréhensibles / Cohérentes / Congruentes.

·        « Je ne savais pas »

Une règle n’est pas une loi, et à l’image du législateur qui affirme que nul n’est censé ignorer la loi, l’entreprise ne peut en faire de même pour ses propres règles. L’entreprise doit tout mettre en œuvre pour que les règles soient le plus possible diffusées et partagées à ceux qui devront s’y conformer.

·        « Je ne comprends pas »

Une règle mal comprise sera une règle mal respectée. Etablir des règles claires, simples et compréhensibles devient dans notre monde complexe une obligation de l’entreprise. L’entreprise se doit de vérifier la bonne compréhension des règles, non pas en attendant la faute au tournent, mais en questionnant les acteurs régulièrement.

·        « Pour quoi faire ? »

Les règles doivent également être cohérentes. Cohérentes entre elles et aussi vis-à-vis de l’objet ou de la situation qu’elles souhaitent réglementer. Le respect d’une règle ne doit pas flirter avec le non-respect d’une autre, ni bien entendu, atteindre une finalité contraire à la volonté initiale. Trop de règles tuent les règles, et les usines à gaz finissent par tuer le règlement. Les contournements ou les rebellions deviennent alors un sport d’émulation collective.

·        « Ça n’a plus de sens ! »

Enfin les règles doivent être congruentes, c’est-à-dire adaptées au contexte dans lequel elles s’exercent. Notre monde bouge très vite et le monde de l’entreprise se doit d’avancer aussi vite. Il est essentiel que les règles puissent continuellement s’adapter au contexte législatif, technologique ou sociétal, sous peine de voir leur application entraver la bonne marche du système ou le scléroser. Faire évoluer les règles et un gage d’efficacité qui ne peut être ignoré. Pour cela, les feedbacks des acteurs de terrain doivent venir nourrir la réflexion collective pour générer les modifications et les évolutions incontournables.

« Les règles ont besoin de rigueur, pas de rigidité »

3.      Faire co-construire les processus au lieu de les imposer

·        C’est celui qui fait qui sait

L’empowerment ou l’autonomisation des acteurs est une notion qui ne date pas d’hier, et qui possède aujourd’hui toute sa crédibilité et toute sa nécessité. Malheureusement nous constatons que derrière la pertinence reconnue d’une telle approche, sa mise en œuvre se confronte à des notions fortes comme le pouvoir, la confiance et la responsabilité. Par crainte de cette confrontation, nécessitant le plus souvent une remise en question personnelle, les directions ont rarement confié le pouvoir de faire comme ils veulent à ceux qui font. La subsidiarité peut défier les lois d’une hiérarchie pyramidale. En instaurant le droit à l’erreur dans l’entreprise, la volonté est double, celle d’en faire moins (d’erreur) et celle de faire mieux (le travail). De nos jours les acteurs de l’entreprises ne peuvent plus se limiter à faire un travail, ils doivent également en construire le « comment ». Combien de personnes en entreprise détectent les failles d’un processus ou d’une méthode, mais continuent de faire avec, par conformisme ou par crainte de les dévoiler. L’acteur se retrouve de fait dans l’obligation d’exécuter une tâche ou une mission par l’utilisation de moyens ou de méthodes qui lui sont également imposés. L’entreprise doit prendre conscience que l’appropriation des processus par l’ensemble des acteurs, passe par la participation à leur élaboration. Les collaborateurs devenant ainsi des co-élaborateurs. Cette appropriation permet non seulement de construire des processus plus performants, mais aussi des processus moins exposés aux risques d’erreurs.

·        Il n’y a pas que le brainstorming

Vous connaissez la méthode du brainstorming, qui consiste, dans sa première phase, à exprimer toutes les idées les plus originales et surtout les plus folles. Les entreprises aiment bien au cours de séminaires ou de journées de formation utiliser cette méthode de réflexion créative. La consigne utilisée dans le brainstorming ou remue-méninges est celle de la liberté totale d’expression sans crainte d’être jugé, humilié ou rejeté par le groupe. Il est toujours très amusant, en tant que consultant et intervenant extérieur de voir combien les personnes ne vont pas spontanément dans cet espace de liberté offert. Il n’y a pas véritablement de craintes, car la bienveillance est de mise, mais c’est plutôt une incapacité intellectuelle et émotionnelle à ne pas aller au-delà d’une limite invisible. Conditionnées par un espace de travail dans lequel l’erreur n’a pas de droit, les personnes construisent elles-mêmes de façon inconsciente un mur de verre derrière lequel la sanction pourrait leur tomber dessus. Dans le brainstorming il n’y a pas de droit à l’erreur, puisqu’il n’y a pas d’erreur possible. Dans la co-élaboration des processus, une liberté de type « brainstorming » doit être mise en place par l’entreprise au service de tous. Passer à coté d’une bonne idée peut coûter très cher à l’entreprise, certaines en ont payé le prix fort !

La responsabilité du management

1.      Une histoire de confiance.

Intégrer le droit à l’erreur en entreprise, engage fortement le management, puisque généralement c’est le manager qui est en première ligne face à l’erreur et à sa gestion. C’est par cette mission de traquer les erreurs, de contrôler et de sanctionner que le management a contribué à la perte de confiance de la part des salariés. Une citation célèbre de Lénine a mis à mal les cultures d’entreprise entraînant avec elle des générations de managers. « La confiance n’exclut pas le contrôle » disait-il. Quelle aubaine de l’utiliser pour tous ceux qui n’osent pas faire confiance ! Si vous deviez travailler avec quelqu’un qui ne vous fait confiance qu’à moitié, comment vous sentiriez-vous ? Eh bien exactement comme avec une personne qui ne vous fait pas du tout confiance. La confiance est un tout indivisible. Une demi confiance n’est qu’une méfiance entière. Le management ne peut intégrer le droit à l’erreur qu’en lui joignant une confiance totale envers ceux qu’il accompagne. Sans une confiance totale et entière non seulement le droit à l’erreur ne peut s’exercer, mais pire encore, cela favorise les comportements inadaptés et erronés. Les managers doivent apprendre la confiance inconditionnelle. Cette confiance n’est pas une confiance a posteriori, exercée sur la base de contrôles prouvant que la confiance est possible. La confiance inconditionnelle est une confiance a priori, dans laquelle, dès le début de la relation, le manager va faire confiance sans condition à son collaborateur. Cette confiance accordée est le point de départ fondamentale d’une relation saine et encourageante. Le droit accordé de faire des erreurs allège considérablement la difficulté à faire confiance dans une relation.

 « Vas-y, tu vas réussir ou tu vas apprendre. Dans les deux cas tu vas grandir »

2.      Une question de culture

L’instauration du droit à l’erreur en entreprise s’interprète selon deux cultures différentes vis-à-vis du règlement interne. Vous avez les premières qui considèrent que tout ce qui n’est pas autorisé est interdit. Et vous avez les secondes qui estiment que tout ce qui n’est pas interdit est autorisé. Nous voyons bien la différence d’esprit qui peut régner dans l’une comme dans l’autre. Les premières énoncent de façon exhaustive tout ce qui doit être fait et sortir du cadre devient une erreur voire une faute. Les secondes se contentent de mettre des limites à ne pas franchir autour d’un espace de liberté où tout le reste est possible. Il est aisé de comprendre que la culture des secondes est totalement adaptée à notre monde complexe et innovant. Et en même temps, il est évident que ces entreprises ont l’obligation d’intégrer le droit à l’erreur dans cet espace de liberté offert par ce type de culture. A quoi servirait cet espace de liberté, sans ce droit ?

« Tu vois les limites du terrain. Eh bien joue comme tu veux maintenant ! »

3.      Une formation à la transformation

Le droit à l’erreur se conjugue bien évidemment avec un droit à la formation continue. Maîtriser son métier et élargir son savoir est sans conteste une façon de limiter un grand nombre d’erreurs. Mais il faut également apprendre à apprendre, c’est-à-dire à être ouvert, curieux et volontaire pour l’apprentissage. Un apprentissage sous la contrainte et par le stress n’est absolument pas formateur. Être formé en urgence dans un moment de reconversion ou de transformation, limite considérablement les capacités de compréhension et d’acquisition. C’est pour cela que de larges catalogues de programmes de formations ou d’apprentissages doivent être proposés à tous et tout le temps. C’est à l’apprenant de savoir ce qu’il doit apprendre et quelle méthode lui semble la meilleure pour lui. Apprendre toujours est incontournable dans un monde dans lequel une majorité des métiers exercés demain, n’existe pas aujourd’hui. Dans le changement hyper rapide de notre contexte en entreprise, un autre apprentissage est essentiel, celui d’apprendre à désapprendre. Il devient urgent de ne plus faire comme avant. Nous devons prendre l’habitude de ne plus avoir d’habitudes. Agir par routine et habitude est une des principales causes d’erreurs. Les assurances en automobiles le savent. L’habitude d’un trajet diminue la vigilance du conducteur et augmente considérablement le risque d’erreurs de conduite. Le lâcher prise sur la politique du : « on n’a toujours fait comme ça », est le meilleur moyen de maintenir une vigilance propre à limiter les erreurs et à découvrir de nouvelles voies. Le monde se transforme en permanence. Ne pas se transformer avec lui serait une grave erreur ! Un point essentiel est aussi à souligner ici. Si la formation à la transformation est un levier permettant d’intégrer le droit à l’erreur, ce même droit est lui aussi un agent formateur. Le droit à l’erreur est un plan de formation et de transformation à lui tout seul. Si l’erreur n’est plus sanctionnable, elle ne doit pas pour autant rester sans suite. C’est la suite que l’on décide de donner à l’erreur qui lui procure une véritable richesse d’apprentissage et d’enseignement. Derrière le droit à l’erreur il y a un devoir, celui d’en tirer profit. Sans cette exploitation de l’erreur, le droit à l’erreur ne serait qu’une confession en vue d’une absolution. Le droit à l’erreur n’est autre qu’un des meilleurs plans de formation que l’on puisse trouver au sein de toutes les entreprises.

 « Tu sais faire autrement ? Alors allons-y ! »

4.      Ecouter les signaux faibles

Le droit à l’erreur permet de ne pas être focalisé sur le risque mais sur les opportunités. Les anglais auraient-ils mieux intégré cette notion en parlant de « take a chance » au lieu de « prise de risque » ? Une fois libéré de la menace due à la sanction de l’erreur, l’acteur peut mettre son énergie sur un autre type de vigilance, celle d’écouter les signaux faibles. Les signaux faibles ne sont pas perceptibles quand nous sommes en stress, mais seulement dans un climat de sérénité. Les signaux faibles sont révélés et amplifiés par l’attention, la perception et l’intuition. Ils permettent de percevoir des changements infimes dans le marché, l’entreprise, l’équipe, les relations ou les processus. Le traitement de ces signaux faibles participe à renforcer la plus grande des capacités à éviter les erreurs et à dénicher les opportunités. Cette capacité est l’anticipation. L’anticipation est certainement le levier de performance que toute entreprise devrait développer chez ses acteurs. Le droit à l’erreur est le premier pas vers l’acquisition d’une réelle capacité d’anticipation.

 « Ecoute ce qui n’est pas encore dit, la solution s’y cache peut-être »

5.      Garder le lien

La vague des nouveaux modes managériaux délégatifs et à distance, combinés aux agendas surchargés et aux enchaînements de réunions, poussent inéluctablement le manager à diminuer ses moments de présence et d’écoute. L’entretien annuel d’évaluation est vécu comme un rare moment d’échange réel avec le manager. Malgré un travail basé sur un nombre important d’échanges d’informations avec de multiples personnes, il existe peu d’espace pour prendre le temps de parler de ce qui fonctionne bien, de ce qui ne fonctionne pas bien et de ce qui pourrait être fait autrement. Cette forme de solitude est vécue difficilement par un grand nombre de collaborateurs que ce soit dans les grandes ou les petites entreprises. Or nous le savons, la solitude, comme l’habitude, peuvent engendrer des erreurs. Le fait de partager les regards et les expériences permet de prendre du recul et paradoxalement de mieux voir ce qui ne va pas ou pourrait aller mieux. L’autonomie des salariés n’est pas l’abandon à eux-mêmes. Nous avons tous besoin de partager ce que nous faisons, que ce soit avec nos supérieurs comme avec nos collègues. Les non-dits et la poussière sous le tapis conduisent très souvent à des erreurs. Dans l’instauration du droit à l’erreur l’entreprise se doit de recréer du lien entre les personnes afin que les échanges soient réguliers et apprenants. Un temps d’échange doit également permettre de parler des erreurs faites pour en extraire là aussi tout l’apprentissage nécessaire.

« Regarde à tes cotés, j’y suis »

Pour conclure

Pour les entreprises, intégrer dans leur fonctionnement le droit à l’erreur est un devoir.

·        Un devoir vis à vis du contexte technologique actuel qui identifie l’erreur comme le facteur fondamental d’opportunités et de développement.

·        Un devoir vis-à-vis du contexte sociétal et humain dans lequel l’apprentissage permanent permettra de relever les plus grands défis.

·        Enfin c’est un devoir, car instaurer le droit à l’erreur est une étape cruciale du changement de paradigme organisationnel et managérial que toute entreprise doit initier pour devenir tout simplement une entreprise plus intelligente.

« Le droit à l’erreur est un devoir à l’intelligence »

 

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